top of page

Ce que les fans trouvent

chez leurs Sims

Haut de page
Passionnées depuis l'enfance ou tombées dans le jeu adulte, ces fans passent des heures à donner libre cours à leur imagination dans Les Sims. Pour beaucoup, le jeu a changé quelque chose dans leur quotidien ou leur esprit. Leur façon de jouer, les raisons de leur intérêt et les éclairages de leur vie personnelle permettent de mieux comprendre l'impact particulier de cette simulation de la vie sur celle des joueurs, bien réelle.

NB : Malgré plusieurs tentatives de mise en relation avec des passionnés, sur plusieurs dizaines de personnes ayant répondu à mes sollicitations, pas un seul joueur masculin n'est apparu. De quoi confirmer l'idée selon laquelle les Sims séduisent surtout les femmes.

Profils
Laurine

Laurine a découvert les Sims très jeune, autour de 7-8 ans. A cet âge, le jeu lui a permis de se « mettre dans la peau de personnages », ce qu’elle a toujours aimé. « J'ai tout de suite accroché parce que j'ai commencé le théâtre et l'écriture à cette période là », et que les Sims lui offraient un terrain d’imagination et de création. Recréer les gens qu’elle connaît, jamais de la vie. Ce qui lui plaît, c’est d’inventer.

 

Dans la vraie vie, Les Sims ont aidé Laurine pour son ancien emploi en tant qu’employée dans… un magasin de meubles. « Parfois, les clients demandaient de l'aide en matière de décoration. Je pense que pouvoir visualiser les choses dans Les Sims m'a aidée ! » Mais l’influence des Sims s’est surtout fait sentir dans ses passe-temps. Laurine a publié des écrits personnels, a rédigé des chansons pour une amie chanteuse, a poursuivi longtemps le théâtre, avant d’arrêter pour ses études. Elle a également le projet de publier un livre.

 

« Le truc génial dans Les Sims, ce sont les possibilités. On peut créer à l'infini : des Sims, des maisons, des histoires… Dans l'écriture et le théâtre ça aide pour trouver l'inspiration, surtout dans l'écriture. Le fait de jouer un autre personnage au théâtre donne, dans le jeu, des personnages inventés plus intéressants. »

 

Aujourd’hui, à 22 ans, Laurine n’a pas passé une seule année sans jouer aux Sims. Malgré une frustation : la lassitude, qui pointe parfois, alors même que l’envie de jouer reste. « Ne plus avoir d’inspiration de temps en temps, ça me rend triste, vraiment. » Pour pallier cette déception, elle alterne entre les différentes versions du jeu.

 

LIRE AUSSI : Un concept qui pousse à l'addiction ?

Amandine

A 10 ans, Amandine découvre les Sims. C’est l’époque où elle entre au collège, où elle rencontre de nouvelles personnes, et où elle découvre la dureté des autres. « J’ai été harcelée au collège », raconte-t-elle, expliquant avoir trouvé dans les Sims « une sorte de thérapie ». « Je refaisais ma vie sans problème dans le jeu. Cette vie virtuelle me permettait de contrôler mes sentiment et mes humeurs », analyse-t-elle aujourd’hui. « Du coup, j'étais toujours heureuse et joyeuse, ça avait l’effet d’un miroir contraire. Ça m'a apporté du réconfort car je savais que, quand je rentrais à la maison, je pouvais aller me réfugier dans cette vie virtuelle, là où le monde n'était que bonheur.»

 

Depuis, la vie a évolué pour Amandine, qui a aujourd’hui 15 ans. Les Sims est redevenu un jeu, même s’il fait « partie de [s]a vie ». « Aujourd'hui, ce n'est plus comme une thérapie mais beaucoup par plaisir, ça me permet d'imaginer ma vie future. Ou même, quand je lis un livre, de le recréer dans Les Sims, ça me permet de mieux visualiser les scènes. »

 

Cette lycéenne apprécie offrir à ses avatars des enfants et le fait de réussir une carrière complète en atteignant tous les postes possibles. Bref, à  « leur faire une vie idéale », en rêvant que la sienne y ressemble.

 

LIRE AUSSI : Soigner par le jeu ?

Le jeu a débuté comme un anti-douleur pour Séverine, atteinte par des insomnies en raison de problèmes de santé. « Moi qui ne jouais jamais à aucun jeu avant, j'ai découvert que celui-là me permettait de m'évader et d'oublier ma douleur. » Ce qui l’a séduite, c’est « l’aspect humoristique des personnages et la possibilité de vivre dans un monde sans violence ». Dans les parties de Séverine, le monde des Sims est celui « des Bisounours ».

 

Séverine expérimente cette « possibilité de paix dans le jeu » sans recréer la réalité. Cette secrétaire comptable considère cette simulation de vie comme « absolument pas comparable et applicable à la réalité ». « Parce que dans la vie, on ne peut pas taper un code pour avoir de l'argent en un claquement de doigt, parce que trouver du travail n'est pas aussi simple qu'un coup de téléphone, parce que se faire des amis ne se fait pas en 7 ou 8 interactions », explique-t-elle. Pour cette joueuse, si la vie des Sims est bien inspirée du réel, « elle est irréelle car beaucoup trop idéaliste, c’est utopique ».

 

Malgré cela, le jeu lui a apporté un apaisement dans sa vraie vie, grâce au monde idéal qu’il offre et à l’humour qui l’a séduite. Séverine a également créé un groupe d’entraide autour des Sims 4, ce qui lui a permis de rencontrer et d’échanger avec de nouvelles personnes.

Séverine

Pendant longtemps, Amélie n’a pas eu le droit de jouer aux Sims. Ses parents considéraient le jeu comme « aussi diabolique que GTA », où l'on incarne un gangster sans morale. Elle l’a découvert au moment de l’adolescence. Comme pour Audrey, la construction tient une part importante dans son mode de jeu. « Ce qui me botte, c'est la construction de maisons ou la reproduction de lieux connus », raconte la joueuse de 23 ans. Des lieux célèbres ou de fictions peuvent inspirer ses créations. Amélie s’est par exemple attelée à reproduire au détail près l’appartement de deux héros de la série Big Bang Theory. « J'ai choisi cet appartement pour le défi de construction et de décoration qu'il représente lié à la difficulté de trouver des objets de décoration se rapprochant des vrais. »

 

Quant au mode normal, le mode « Vie », les quelques fois où Amélie y joue, elle prend plaisir à établir un monde infernal et sombre. « Quand j'ai commencé le jeu, je faisais comme toutes les jeunes ados : mon chéri du moment, nos enfants, etc. », se souvient-elle. « Puis un jour je me suis dit "à quoi bon?" Est-ce que je m'amuse ? Non, parce que je m'impose moi même des restrictions en faisant ça. Je ne veux pas que mon chéri Sim me trompe, donc je n'exploite pas tout le gameplay qui tourne autour de la jalousie dans le jeu par exemple. »

 

Rapidement, le schéma classique laisse donc place à un univers loufoque et décomplexé. Les Sims se trompent, dépriment, mènent une vie de débauche. Rapidement, Amélie ajoute des mods (des créations d’autres joueurs, voir Tout connaître des Sims) permettant de faire évoluer le quartier seul et de manière peu orthodoxe -vol, délinquance, factions-, de faire courir des maladies, d’introduire des substances addictives créant du manque… Récemment, Amélie a également recherché un mod permettant de faire advenir des meurtres. Des tournures « glauques » qu’Amélie reconnaît bien volontiers.

 

Pourquoi cette violence, cette perversité ? « C'est un JEU. Rien n’est réel, donc pourquoi ne pas faire un sims dépressif et voir ce que ça donne? », analyse simplement Amélie. « C'est irréel, c'est, au fond, ni plus ni moins qu'un tas de pixels animé par une intelligence artificielle. Il y a tant de choses loufoques à faire, pourquoi s'en priver ? »

Amélie

Michaël Stora :

 

«Le jeu est toujours un espace de mise en scène des pulsions agressives. Quand un enfant joue avec des Lego, il adore construire, mais il adore casser après.

Ce n’est pas parce que je mets en scène de la perversion dans un jeu que je suis pervers. Mais je flirte avec la limite. »

L’aventure Sims, pour Clémence, a commencé à 6 ans. « Je ne sais pas si on peut réellement dire que j'y jouais puisque je ne savais même pas lire ! Je cliquais un peu partout mais ça m'amusais bien », s’amuse-t-elle. De quoi enchaîner Les Sims 1, Les Sims 2 et Les Sims 3 avec presque la totalité des disques additionnels. Les Sims 4, évidemment, a déjà rejoint la collection. Et Clémence attend déjà les prochains add-ons.

 

Dans le jeu, Clémence a toujours « aimé faire de grandes familles, avec une mère de famille ou, plus récemment, un père de famille », explique-t-elle. Les générations, c’est ce qui lui plaît. La famille nombreuse, dans la vraie vie, elle ne connaît pas tellement. « Je n'ai pas de frères et sœurs, ou du moins seulement des demi-frères et sœurs avec qui je ne m'entends pas très bien et qui sont bien plus grands que moi. » Une façon de combler ce manque ? « En fait, ce n'est pas pour les relations entre frères et sœurs que j'aime faire des grandes familles, mais plutôt en me plaçant comme femme de famille qui dirige tout, depuis les heures des repas jusqu'aux devoirs des enfants », analyse Clémence.

 

Dans le jeu, il y a pour elle un « besoin de contrôler tout ce qui se passe dans les Sims : le ménage, les courses, l'éducation des enfants, etc. » Une façon de donner énormément de choses à faire à ses personnages et, ainsi, « de ne pas voir les journées de mes Sims passer, en le levant à 3 h du matin et en le couchant à minuit… » Clémence le reconnaît : elle aime surcharger ses avatars de travail car elle agit ainsi avec elle-même. « J'aime apprendre et j'adore être sous pression à cause de nombreux devoirs ou leçons à apprendre, et pourtant je ne sais pas pourquoi, mais je n'arrive jamais à travailler autant que je le voudrais », confie cette élève de terminale littéraire. Clémence se voit comme « une élève moyenne » alors même qu’elle pourrait « être bien mieux ». « C'est donc dans Les Sims que, je pense, je réalise ce que je voudrais faire dans la réalité », résume-t-elle.

 

Quant au côté mère de famille, c’est là aussi une façon de se projeter. « Plus tard, si j’ai des enfants, j’aimerais faire beaucoup de choses avec eux, leur préparer le petit déjeuner le dimanche matin, et les faire aller à de nombreuses activités. Tout ce que je fais dans les sims avec les enfants, c'est ce que j'aimerais faire avec "mes enfants" plus tard ! »

 

De quoi rêver sa vie et oublier ce qui ne lui plaît pas trop dans la sienne. « Sans rire, les Sims ont toujours été comme une échappatoire pour moi et une façon de construire une nouvelle vie, en reprenant tout à zéro. Quand j'ai eu des problèmes ou que ça n'allait pas avec mes parents, j'aimais jouer un peu aux Sims, un peu comme un journal intime ou un ami de longue date, c'est assez étrange à expliquer ! » Ce jeu vidéo a fini par être sa peluche de petite fille. « C'est devenu une part de mon enfance, ça me rassure de jouer aux Sims, je me sens protégée, un peu comme avec un ancien doudou ! » Un aspect rassurant dans lequel Clémence perçoit bien le risque de l'addiction :
« Le risque de s'identifier au personnage créé c'est de vivre sa vie au lieu de vivre la nôtre. Parfois j'ai l'impression de perdre mon temps à jouer aux Sims, même si j'adore ça, alors que je pourrais faire mille autres choses dehors ! »

 

LIRE AUSSI : Un concept qui pousse à l'addiction ?

Clémence

Michaël Stora :

 

« Là où c’est un jeu qui peut être inquiétant, c’est que c’est un jeu sans fin. »

Audrey

Les personnages n’ont pas autant d’intérêt que les maisons pour Audrey. Sa vraie passion, dans Les Sims, comme Amélie, c’est la construction. « J'aime imaginer des maisons ou des terrains communautaires qu’il me plairait d'avoir en vrai ! » A force de créer, elle a même fini par ouvrir un site pour présenter ses constructions afin de les partager avec d’autres fans. « Pour moi chaque nouvelle construction est comme une "œuvre". Je ne sais jamais vraiment à quoi cela va ressembler quand je commence. C'est un peu comme faire de la poterie ! Il m'arrive d'avoir une idée bien précise et au final je construis tout à fait autre chose ! »

 

Audrey s’est également lancée dans des « challenges », des modes de jeu encadrés par des règles que se fixe la communauté, afin d’accompagner ses constructions. Le premier dans lequel Audrey s’est lancée est par exemple le challenge écolo, dans lequel il s’agit de créer une famille vivant en harmonie avec la nature sur quatre générations, bien loin de la société de consommation. « Un vrai défi pour moi car je ne joue jamais avec la même famille très longtemps ! », explique Audrey. Par la suite, elle a tenté le challence Legacy (« héritage » en anglais), dans lequel une famille doit atterrir sur un terrai presque vide et prospérer pendant dix générations. « Les Sims c'est plus qu'un jeu pour moi car on peut vraiment le modeler à sa façon et chaque partie est unique ! », juge Audrey.

 

Dans la vraie vie, l'utilisation du jeu a aussi apporté certaines choses à Audrey. La construction et la pratique intensive des Sims lui ont appris à utiliser certains logiciels et à travailler certaines aptitudes : « Cela m'a aussi permis de découvrir autre chose comme la retouche de photo, de créer mes propres tableaux pour rajouter au jeu, mais aussi l'écriture avec mes blogs de retouche photo pour partager ma passion », énumère-t-elle.

 

Autre aspect important du jeu dans sa vie : les rencontres. « Avec Les Sims, on crée et on partage beaucoup avec les autres joueurs, plus qu'avec les autres jeux à mon avis. » Avant d’avoir un enfant, Audrey essayait de s’investir « le plus possible dans la communauté » à travers le partage de ses créations, ou en participant à des concours ou des ateliers. « On discute avec les autres joueurs, on s'entraide. Le meilleur moyen d'apprendre c'est d'échanger ses connaissances les uns avec les autres ! Avec mes amis simmeurs je partage mes photos, mes créations, mon "savoir" mais on discute aussi de tout et de rien comme feraient des amis hors jeux ! »

Sahra

Sahra se considère comme une fan absolue du jeu. « Je pense que je possède 80% de tous les disques additionnels, kits compris, qui sont sortis pour Les Sims 2 », liste-t-elle. « Dès que Les Sims 3 est sorti, j’ai couru l'acheter le jour-même. C’était un 4 juin je crois ? » Bien sûr, elle a rapidement acheté Les Sims 4 après leur sortie même si, à 18 ans, elle y passe un peu moins de temps pour réussir ses études.

 

La façon de jouer préférée de Sahra, c’est ‘à la loyale’, façon self made woman américaine. « J'adorais débuter avec rien, sans le code "motherlode" (qui permet de ganer instantanément de l'agent, voir Tout connaître des Sims) et devenir riche, avoir plein d'enfants, que des filles, et surtout une maison de rêve ! », raconte l’étudiante en première année de Droit. Pourquoi s’empêcher d’utiliser un code qu’on connaît ? « Parce que c'est de la triche, je préfère bien galérer au début et devenir riche parce que je le méritais ! »

 

Pour que le jeu ressemble davantage à la réalité, elle a également ajouté le mod qui permet à tout le quartier d’évoluer librement. « Sans ce mod, il n'y a que la famille dans laquelle on joue qui a des enfants, qui se marie, qui divorce… Ce n'était pas réaliste. » D’ailleurs, dans Les Sims 4, elle regrette la disparition des arbres généalogiques. Selon elle, pour « ce qui touche à la famille », il faudrait « que les conventions soient mieux respectées », comme le fait que la femme et l'homme aient le même nom.

 

Pour autant, Sahra n’a pas forcément l’impression de se projeter elle-même dans ces réussites. Elle reconnaît que « ce jeu de simulation est une révélation » pour elle, et estime « qu'avec ces histoires, ces personnes créées, on s'imagine dans leur peau et ça nous fait rêver ! ». Mais Sahra ne recrée pas ses proches dans le jeu. « Si je me projette, je pense que c’est plutôt de façon inconsciente. »  Reste que sa manie de ne jouer qu’avec des filles traduit bien sa propre personnalité. « Je fais toujours une fille en commençant la partie, après je lui trouve un mec, et ainsi de suite. Jamais le contraire ! », reconnaît-elle. « Ensuite, si un jour j'ai un enfant, je préfèrerais que ce soit une fille. Je m'en sortirais mieux ! »

 

LIRE AUSSI : "Le jeu permet d'établir un dialogue avec nous-même"

bottom of page